Note 38 – Situation des jeunes adultes sur le marché du logement luxembourgeois Résumé

Les conditions d’accès au logement jouent un rôle essentiel dans l’entrée dans la vie adulte. Il est cependant de plus en plus difficile pour les jeunes adultes de faire leur entrée sur le marché du logement dans des contextes dits « tendus » – typiquement les milieux urbains qui concentrent institutions d’enseignement supérieur, opportunités d’emploi, aménités et opportunités d’interactions sociales – où ils peinent à accéder à la propriété privée ou à trouver un logement abordable. Ces difficultés les poussent à rester plus longtemps au foyer familial ou à louer (en colocation) un logement sur le marché privé. Au vu de ces évolutions globales, cette note présente une analyse de la situation des jeunes adultes (19 – 35 ans) sur le marché du logement luxembourgeois, sujet à une crise du logement qui impacte profondément les résidents.

Cette note se base sur les données de l’enquête « logement abordable » réalisée par l’Observatoire de l’Habitat en 2023 pour les répondants âgés de 19 à 35 ans (32% des répondants – échantillonnage des ménages administratifs), représentatifs en termes de composition de ménage, statut d’occupation et statut professionnel. Notre étude s’est concentrée sur trois aspects de la situation de logement des jeunes adultes :

  1. Les étapes de l’entrée sur le marché du logement, à travers l’évolution du statut d’occupation en fonction de l’âge (Figure 1). L’âge auquel les propriétaires deviennent majoritaires varie cependant selon que l’on habite en milieu urbain ou rural et est particulièrement avancé à Luxembourg-Ville (entre 44 et 50 ans). Ce résultat témoigne des difficultés croissantes des jeunes à trouver un logement abordable et devenir propriétaires, voire louer un logement de manière autonome (40% des 19-27 ans logés gratuitement déclarent occuper un emploi), dans les milieux urbains.

  2. La situation des jeunes sur le marché locatif privé, à travers l’analyse du niveau de satisfaction des jeunes locataires (60% d’insatisfaits parmi les locataires avec loyer normal), le manque de perspectives résidentielles de ceux qui ne peuvent pas déménager (pour des raisons financières), et la proportion de jeunes adultes sujets à un taux d’effort brut important (plus d’un tiers du groupe étudié). De telles contraintes financières orientent les choix résidentiels, tels que celui de la colocation (59% des répondants vivant en colocation sont des jeunes) ou la volonté de déménager en dehors du Luxembourg.

  3. Les inégalités d’accès à la propriété privée parmi les jeunes adultes. Ces inégalités se manifestent à travers des mécanismes tels que l’héritage, le soutien financier des proches (un tiers des jeunes en bénéficie au moment de l’achat d’un bien), ou le background migratoire. Par exemple, la proportion de propriétaires parmi les jeunes de nationalité luxembourgeoise ayant au moins un parent né au Luxembourg est de 45% contre seulement 7% pour ceux ayant une nationalité hors Union Européenne et des parents nés à l’étranger.

Au vu de ces constats, il pourrait être pertinent de créer des aides ciblées en complément du large panel d’aides au logement disponibles au Luxembourg, dont les jeunes adultes peuvent être indirectement exclus, vu leur situation particulière d’entrée sur les marchés du logement et du travail. Des aides ciblées existent par exemple dans les pays voisins du Luxembourg et portent à la fois sur le soutien à l’accession à la propriété privée des jeunes, les aides individuelles pour des tranches d’âge précises ou encore la (co-)production de logements abordables pour étudiants et/ou jeunes actifs. Néanmoins, leur transférabilité potentielle doit tenir compte des spécificités du système de politique de logement luxembourgeois.

Les résultats présentés dans cette note soulèvent de nouvelles questions de recherche. Il nous semble en premier lieu essentiel de mieux connaître les trajectoires et les aspirations résidentielles des jeunes adultes et de les relier à leur parcours professionnel. Les obstacles auxquels les jeunes adultes font face dans différents segments du marché du logement mériteraient également d’être mieux connus. Pour terminer, une meilleure compréhension de la mobilité résidentielle des jeunes adultes et des implications en termes d’exclusion et d’inégalités socio-spatiales permettrait de compléter les recherches en cours quant aux enjeux transfrontaliers.

Figure 1. Statut d’occupation par tranche d’âge (part des répondants pour l’ensemble du pays)

Note méthodologique : les courbes correspondent à la moyenne glissante du taux de répondants occupant un statut donné sur cinq ans. Source : enquête « logement abordable », 2023.

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